Un esprit forgé pour l’avenir

Un esprit forgé pour l’avenir
Une mémoire vivante

Ce dimanche 14 avril 2013 sous un ciel béni des Dieux alors que depuis quelque temps il nous tombait sur la tête, et «  toujours prêts » à relever un défi, une quarantaine de personnes se sont retrouvées au cimetière sud du Mans pour rendre un hommage au Père Bernard Letourneux, celui qu’on appelait l’Abbé (1911 – 1994).

Son réseau de connaissances et son entregent permettaient de tisser une toile de relations entre tous. Il nous réunissait à nouveau autour de sa tombe en déshérence et camouflée par un énorme thuya touffu qui méritait bien qu’on s’y attarda.

Le Père Letourneux fut successivement affecté aux paroisses de Sillé-le-Guillaume (1937) puis La Couture au Mans (1940), Arnage (1944) et en mission (1952) que l’on pourrait qualifier de commando avec d’autres abbés dans les nouveaux quartiers populaires du sud de la ville : à Sainte Thérèse où il participera activement à sa construction et à son rayonnement.

Un esprit forgé pour l’avenir…
Taillé au burin dans un bloc de granite, rugueux et direct dans son langage, il était un phare pour la jeunesse. C’est en tant qu’aumônier scout que beaucoup l’ont approché, connu. C’est dans les mouvements de JEM(*) et de l’Action Catholique qu’il transmettra toute son influence.

Engagé il l’était, indigné certainement. Spirituel dans tous les sens du terme.
Intégré intimement dans les quartiers, il œuvrait quelle que soit la couleur de la famille. Certes c’était une personnalité qui ne passait pas inaperçue : sa moto, son ceinturon, son béret, sa vieille soutane, sa pipe dessinaient le personnage.
Plein de force jusqu’au bout ; alors qu’amputé des deux jambes il avait perdu son autonomie.

Quelques prières de recueillement, mais surtout une grande joie. La loi scoute rappelée, le cantique des patrouilles chanté. Une délégation officielle des scouts et guides de France déposait une gerbe de fleurs, l’étendard à croix potencé rappelait la symbolique de la promesse.
Une cérémonie courte, simple, sobre mais profondément émouvante où chacun pouvait se souvenir et témoigner du chemin qu’il nous a tracé.

Une mémoire vivante…
Tous ces jeunes « anciens » séparés depuis cinquante années (à chacun sa mesure du temps) se retrouvaient, dans une joyeuse ambiance autour d’un apéro dans un cottage de Mulsanne. Non ce n’était pas la course mais des instants vécus ensemble. Pas de nostalgie, chacun de raconter son parcours, toujours garder la mémoire et l’expérience qui nous a construit. Qu’es-tu devenu ? Quel parcours as-tu fait ? Qu’est-ce que vivre pour toi ? Autant de réponses attendues qui nous reliaient les uns aux autres.

Pour continuer ce partage, c’était le repas en commun ; des photos exposées où le jeu consistait à retrouver qui celui-ci, qui celle-là, qui n’a pas donné son nom ?

Autour de l’Abbé, rien ne fut perdu, il fallait rassembler, écrire, et laisser vivre.

Et comme il faut bien « collecter quelques fonds pour la popote paroissiale » (expression du Père à la fin de l’office religieux), sa tombe sera remise dans un état plus digne et conforme à son occupant. Mais si son corps est ici, nous sommes sûrs que là-haut il doit bien faire se fendre la pêche à ceux du dernier rang.

Il avait mis son engagement auprès de Dieu au service des hommes. Nous le retrouverons dans le même esprit, c’est notre engagement.

C’était une belle journée, grand merci à tous.

(*) JEM : Jeunes en Marche, branche ainée des Guides de France et des Scouts de France dans les années 60.

Bernard DUBUISSON
« un de la onzième ! ».
21 avril 2013